Les Salles sur Verdon.com

Monographie des Salles-sur-Verdon
de M. François Simian,
instituteur à l'école communale du village.
Texte intégral



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TOPONYME

Salets (1038-1252) - Sala - Salac(1) - Anciennement Les Salles.
Salle : maison rurale ayant une salle de réception.
Salle : le bourg où il y avait plusieurs maisons avec une salle.
Peut-être allemand SAAL : chambre, château (cf. les 3 Tours de ses Armes).
D'après Fluse, les noms des localités formées sur Sala (torrent) désignent des agglomérations bâties près d'un cours d'eau.

Le blason du village des Salles

HISTOIRE LOCALE JUSQU'EN 1914

Au début du XIIe siècle, la famille Moustiers possède Les Salles, elle est encore présente au milieu du XIIIe. En 1371, l'évêque de Riez y a juridiction. En 1380, il existe un prieuré de 2 moines, dépendant de St-Victor de Marseille, cette abbaye existe encore à la veille de la Révolution.
Au début du XIVe siècle, Les Salles comptent 200 habitants, on en compte 300 en 1765 et 460 en 1851.
Au début du siècle, il existe encore une minoterie et un moulin à huile. On cultive le blé (250 ha - production 1500 quintaux). On y récolte aussi des pommes de terre, des amandes, des légumes et des truffes renommées. Avec l'osier qui abonde, les habitants ont établi une fabrique de vannerie. Ils font aussi des instruments aratoires et des articles de pêche.


HISTOIRE DE 1914 AU BARRAGE

De nombreux jeunes sont morts sur les champs de bataille et la vie du village s'en ressent. Minoterie et moulin à huile disparaissent ainsi que les petites industries. L'osier est toujours aussi abondant mais il n'est plus exploité que par les "romanichels". Les anciens parlent d'un dénommé Sicetti, patron du bar de la place, vannier et musicien amateur qui animait les bals et les fêtes en grattant sur son violon. Sur sa tombe, il fit graver "ici gît Sicetti, dit le "vénard" qui mourut ni trop tôt, ni trop tard, passants qui lisez ceci, tôt ou tard vous mourrez aussi".

Le village compte de moins en moins d'habitants. Jusqu'en octobre 1924, il y avait deux classes à l'école, une de filles et une de garçons. A partir de cette date, il n'y a plus qu'une seule classe regroupant filles et garçons, la directrice est Madame Escoffier qui est restée en poste jusqu'en 1940.

Le village est bien implanté sur des terres d’alluvions très riches des bords du Verdon, à l’entrée du Grand Canyon, mais les paysans sont pauvres.

Sur les 1200 hectares que compte la commune, les terres les plus fertiles sont possédées par quatre familles : Roux - Naegely - Bagarry(2) et Remusat qui emploient des fermiers. La majeure partie des habitants possède quelques lopins de terre, le plus souvent gagnés sur les pentes en arrachant les pierres que l’on charrie dans des couffins pour former des tas (les clapiers) que l’on trouve encore de nos jours.

Après la Guerre de 14, il y avait trois boulangers aux Salles : Marc Martin, Sage et le frère du mécano dit "Le Fourneiron". Petit à petit, on abandonne le four communal et le village ne compte plus qu’un seul boulanger, M. Taxil Isidore.

Dans les années 20, certains avaient l’habitude de ne pas payer le pain chaque fois qu'ils en prenaient. On utilisait pour cela la "TAILLE", sorte d'ardoise ou de crédit. Cette opération consistait à se servir d’une baguette en osier d’environ 30 cm que l’on partageait en deux dans le sens de la longueur, une partie pour le boulanger, l'autre pour le client. Quand celui-ci désirait un kilo de pain, le boulanger faisait une entaille sur le chant de chaque demi-baguette en les réunissant. Si l'achat était de 5 kilos, on faisait l’encoche sur l’arrondi. A la boulangerie, les baguettes étaient suspendues à des crochets portant le nom de chaque client. Lorsqu’il n’était plus possible de faire des entailles, il fallait régler ce qui n’allait pas toujours sans tiraillements.

Au début du siècle, certaines familles pratiquaient l’élevage des vers à soie. Nous n’en voulons pour preuve que le surnom donné au cadet de la famille Martin, surnommé "MAGNAN" (la magnanerie désigne l’élevage du ver à soie). Celui-ci, né en 1909, à quitté Les Salles pour aller travailler aux chemins de fer dans le réseau "P.L.M." (Paris-Lyon-Méditerranée). A cette époque, les chemins de fer étaient divisés en réseaux, remplacés aujourd’hui par la "SNCF".

On vit comme à la fin du siècle dernier, PAS D’ELECTRICITE, on s’éclaire avec la bougie, le calèn (lampe à huile) ou la lampe à pétrole ; PAS D'EAU au robinet dans la maison, on va chercher l'eau à la fontaine, pas de tout à l'égout, on vide les eaux usées sur des tas de buis disposés contre le mur des maisons. Quand on ne vidait pas le seau hygiénique dans le Riou ou le canal d'arrosage, on le vidait sur le tas de buis. A l'époque, il y avait de nombreux cas de fièvres typhoïdes. Le métier de paysan était très dur, les familles sont nombreuses, les jeunes ne peuvent rester au village, ils sont attirés par la ville, c'est la désertification des campagnes. En ce temps là, à la campagne, on était superstitieux. On croyait aux jeteurs de sort, aux guérisseurs. C'est que l'on ne sortait pas, on vivait en vase clos. Avec le progrès, avec le développement des moyens de communication, de nos jours, ces croyances ont disparu.

Petit à petit, la vie va s'améliorer. C'est d'abord dans les années 1930, l'électrification des campagnes et la modernisation que l'électricité apporte dans les maisons.

Comme on a planté beaucoup de chênes truffiers, la récolte des truffes est de plus en plus abondante. A la veille du barrage, c'est 4 TONNES DE TRUFFES à 12 500 Francs (anciens) le kilo que les Sallois apportent au marché de Riez le mercredi et le samedi. Signe de richesse, le village possède 16 TRACTEURS.

Une autre source d'enrichissement pour les Sallois est la lavande. Sur le territoire de la commune, le long du canal d'arrosage, on compte 7 ALAMBICS où on distille la lavande. Ce canal d'arrosage compte beaucoup pour le village, aussi il est géré par un Syndicat qui est chargé de son entretien. Tous les ans, il faut le curer. A l'époque, c'est "Le Grand Louis" qui est président du Syndicat.

Autre signe de richesse, on compte aux Salles 4 TROUPEAUX DE MOUTONS. Pour compléter la modernisation et augmenter le bien être des 200 Sallois, c'est l'adduction d'eau dans les années 1950 et le tout à l'égout dans les années 1960 avant le barrage.

Même pendant l'occupation allemande, les Sallois n'ont pas souffert comme ceux de la ville. Quelques hommes sont partis à St-Raphaël pour le travail obligatoire (la T.O.D.) mais ils sont toujours revenus. Cultivant le blé, ils pouvaient se procurer de la farine chez le meunier Ruffin et avoir du pain chez le boulanger Taxil. Grâce au troc, ils pouvaient se procurer pâtes, riz, café, sucre, etc. Quelques familles de la ville sont venues aux Salles pendant cette période et l'école a compté jusqu'à 28 élèves.

Les Allemands n'ont fait qu'une seule incursion dans le village. De temps en temps, les maquisards de Canjuers venaient se détendre à l'Auberge du "Coin Perdu".


LA VIE DU VILLAGE

Le village est très animé et très vivant. La vie s'écoule à un rythme bien établi, celui des saisons. Tous les jours ce sont les chevaux que l'on amène boire à la fontaine sous les ormes séculaires. Au moment de la fenaison, c'est la ronde des charrettes chargées de foin vers les hangars, les granges et les fenils et la bonne odeur qui règne partout. Quand les moissons arrivent, ce sont les gerbiers qui se dressent au bord des aires et la ronde incessante des chevaux et des rouleaux qui écrasent les épis dans une auréole de soleil, de poussière et de taons. Une des aires les plus importantes était celle du "Barda". Comme elle était située près du "vallat", le soir après une rude journée, quoi de plus agréable que d'aller s'y plonger. Cela, à condition que la place ne soit pas occupée par les lavandières en train de rincer la "bugado" (lessive).

Cinq à six fois par an, c'était l'époque de la grande lessive. Ce jour-là, branle-bas de combat à la maison, femmes et enfants étaient occupés. De bon matin, on entassait les draps (quelquefois 50) dans de grands cuviers, sur les draps on plaçait une toile et sur la toile des cendres que l'on achetait parfois chez le boulanger, car il fallait qu'elles soient propres. Sur celles-ci, on versait de l'eau chaude. Cette eau était récupérée au bas des cuviers dans des bassines, c'était le "lessif". Avec des casseroles, les enfants la reversaient sur les cendres et ainsi de suite une grande partie de la journée. Il fallait aussi entretenir le feu sous le cuvier. Si l'opération était agréable au départ, elle l'était moins à la fin. Surtout, n'allez pas croire que les paysans ne changeaient pas souvent leurs draps, à l'époque les armoires en étaient pleines.

Avec l'arrivée des machines à laver, cette coutume a disparu. Mais jusqu'au barrage, on a continué à laver le linge au "vallat" et il n'était pas rare de voir "sereiner" les draps dans le champ du "Barda".

Le travail sur l'aire était long et très pénible aussi, après l'occupation, les propriétaires se sont groupés pour acheter une batteuse. A la fin du battage, c'était la fête. Au petit matin, c'était aussi le ronflement des "ventarelles" pour séparer le grain de la paille. Jusqu'aux années 1950, on pratiquait les "prestations". Le prestataire est un contribuable assujetti à une prestation en nature, l'entretien des chemins vicinaux par exemple. De temps en temps, c'était le tintement du marteau du maréchal-ferrant sur l'enclume et l'odeur de la corne brûlée qui se répandait autour de la forge. Quoi de plus intéressant pour les enfants et les oisifs de voir ferrer un cheval !

Tous les jours, un peu avant midi, les habitués viennent aux nouvelles sur le banc du "château", maison de maître. Quand on passe sur la place, c'est un plaisir d'admirer la dextérité de M. Rouvier en train de tourner pilons, mortiers ou bouchons. Le soir, c'est le défilé des brocs vers la maison Constant, seul propriétaire de vaches, pour le lait du petit déjeuner. On peut se détendre agréablement en pratiquant la chasse ou la pêche, car gibiers et poissons sont très abondants. On n'a pas de soucis pour s'approvisionner car 3 épiceries, une boulangerie et une boucherie sont ouvertes tous les jours. On trouve aussi aux Salles un coiffeur en la personne de "Tave" ; chez Mouraire, on peut s'habiller ou acheter des draps, 2 cordonniers fabriquent des souliers et vendent des chaussures ; l'un deux, Monsieur Goby avait la particularité de siffler en toute occasion, l'autre était le beau-père du "Grand Louis", on le surnommait Filochard, Le Ciron ou Le Fin Merle. Jusqu'à la guerre de 14-18, on avait l'habitude de donner des surnoms aux personnes. J'allais oublier qu'on pouvait acheter des vélos chez "le mécano" qui était aussi un peintre "naïf". Qui ne se souvient pas du petit café qui a été tenu par Sicetti - Mme Perrier - Titine - Brunet - Pessègue - M. Taxil et par son fils Raymond ; on ne peut aussi oublier l'Auberge du Coin Perdu chère à Germaine Anot.

En ce qui concerne les moyens de communication à cette époque, le village était mieux desservi qu'aujourd'hui. Par tous les temps, Lovera passait tous les jours, même pendant l'occupation avec son "gazogène". C'était le chauffeur du véhicule reliant Moustiers à Draguignan par Les Salles, Bauduen, Baudinard, Moissac, Aups, Tourtour et Lentier. Il partait à 5 heures de Moustiers, il y retournait le soir à 20 heures. Il apportait le courrier, les commissions et le ravitaillement pour les commerces. Il était sérieux, ponctuel, dévoué et très serviable. Il est vrai qu'il y avait moins de véhicules automobiles en ce temps.


DU BARRAGE A NOS JOURS

L'idée du barrage n'est pas récente. Un syndicat de défense fut crée en 1930, il avait à sa tête M. Remusat ; à l'époque, la "Société Schneider" projetait déjà de construire le barrage. Celui-ci était pour les Sallois comme une épée de Damoclès sur leur tête. On y croyait sans y croire et l'on n'osait rien entreprendre. Malgré tout, la vie continuait.

Au début, les Sallois ont manifesté violemment leur opposition en fermant leurs portes au nez des enquêteurs. Lors d'une réunion présidée par le Préfet, un magnétophone à été mis en place pour enregistrer les promesses. Malgré cela, EDF envoie aux Salles un ingénieur, M. Béranger, pour préparer l'implantation du mur. Comme ce dernier est propriétaire dans la commune, il peut donner des conseils mais on ne l'écoutera pas. On met en place un syndicat de défense. On lutte mais on sait très bien que le barrage se fera. Il n'est plus question d'être pour ou contre : l'important est de se grouper pour lutter efficacement contre EDF.

Le 6 janvier 1967, l'enquête parcellaire est annoncée. A partir de mars 1969, on creuse un canal de dérivation avec batardeau. Pendant l'enquête parcellaire, il y a désaccord sur les truffières, celles-ci sont implantées sur des terrains pauvres (landes). De plus, la truffe est une récolte qui n'est pas déclarée. Afin d'estimer ces terrains et la récolte, les enquêteurs suivent les propriétaires pendant celle-ci.

Au départ, l'eau devait monter jusqu'à la cote 500. L'île de Costebelle aurait été submergée ainsi que les villages de Bauduen et de Sainte-Croix. Il était question de reconstruire le village sur la commune d'Aiguines. En abaissant la cote à 482, on a pu l'implanter sur le plateau de Bocouenne et on a sauvé les villages de Bauduen et Sainte-Croix mais les Sallois restent seuls pour lutter.

Pour réaliser le lotissement, il faut exproprier les propriétaires du plateau de Bocouenne. Ceux-ci sont mécontents d'être expropriés une seconde fois. Ils le sont encore plus lorsqu'ils apprennent le prix fixé par la mairie lors de l'évaluation des terrains.

En mars 1970 commence l'achat des terrains par EDF. Il n'est pas question de permettre aux enquêteurs de pénétrer dans les maisons. Quand le syndicat permet de le faire, le mécontentement grandit et un nouveau syndicat voit le jour. Au lieu de lutter, de se serrer les coudes, les Sallois se sont divisés et cette situation a grandement facilité la tâche de la "puissante EDF".

Quelques petits propriétaires sont bien heureux de vendre au delà de leurs espérances une vieille maison ou un petit lopin de terre. Chacun espère de s'en tirer à meilleur compte que le voisin. Certains courtisent même les agents EDF dans l'espoir de mieux vendre. Adieu les bonnes résolutions. C'est le "chacun pour soi". Très peu de dossiers vont à l'expropriation.

A cette époque, M. Gombert, maire du village, pose la première pierre du lotissement et met en vente les lots, cette vente sera annulée.

En mars 1971, le maire est battu aux élections municipales par un inconnu qui n'est pas électeur aux Salles, M. Charles "Rossely de Lorgues" qui se dit "Comte de Provence". M. Signoret et M. Perrier disent que c'est un homme qui peut beaucoup apporter aux Salles.

Si EDF reconnaît la reconstruction du village, elle ne prend pas à sa charge la reconstruction des maisons.

Toujours en 1971, on implante la route d'accès au village et on réalise l'alimentation en eau. On admet le principe de restitution de 4 litres seconde d'eau brute tirée dans le barrage, à la commune d'Aiguines contre 2 litres seconde d'eau potable tirée source de "Chardes".

En septembre 1971, c'est l'achat définitif des lots du nouveau village (1ère tranche).

De mai 1973 à août 1973, tous les résidents secondaires doivent libérer leurs maisons. Les résidents permanents le feront en janvier 1974.

En novembre 1973, c'est la mise en eau du barrage et c'est l'exode des Sallois.

Quoi de plus émouvant que le transfert des morts vers le cimetière du nouveau village. Quoi de plus triste que l'agonie lente d'un village. Quoi de plus éprouvant que de voir disparaître l'endroit où l'on est né, où l'on a appris à lire, où l'on à vécu. Quoi de plus douloureux que la transformation d'un paysage verdoyant et gai en véritable désert. Quoi de plus affligeant que de voir tomber les maisons les unes après les autres sous les coups de boutoir des bulldozers.

Comment assister au dynamitage de l'église sans émotion ? Comment ne pas être écoeuré face aux harcèlements et aux agissements des brocanteurs et des pilleurs. Quel spectacle plus désolant qu'un village transformé en un immense tas de pierres avec comme seule présence des chats abandonnés errant parmi les ruines.

Le jeune paysan qui n'avait pas de problèmes aux Salles trouvera-t-il ailleurs une exploitation qui lui permettra de vivre ? Ne devra-t-il pas changer de métier ? S'adaptera-t-il ? La situation est encore plus problématique pour les personnes âgées qui doivent quitter le village. Elles qui avaient leurs habitudes au pays, transplantées ailleurs ne seront-elles pas malheureuses ? Tous ceux qui sont obligés d'investir au nouveau village seront-ils sûrs que leurs affaires marcheront ? Pour les personnes "entre 2 âges" qui sont trop vieilles pour repartir avec des emprunts et trop jeunes pour la retraite, comment envisager pour elles une reconversion pas toujours facile avec l'inconnu d'un métier et d'un pays nouveau ?

En février 1974, les derniers habitants sont évacués sans heurt, par les forces de Gendarmerie. Il s'agit de M. Signoret dont la maison baigne déjà dans l'eau et de M. Richard-père.

Les maisons du vieux village ont été estimées avec un coefficient de vétusté de 75% ce qui est injuste car EDF aurait dû rebâtir les maisons à tous ceux qui ont été expropriés et qui manifestaient le désir de s'installer au nouveau chef-lieu. Aussi, c'est dur d'entendre les touristes dire que EDF nous a construit de belles maisons, que nous n'avons pas perdu au change. Pour reloger les Sallois dont la maison n'est pas terminée et ceux qui n'ont pas les moyens, EDF aide à la construction de huit logements sociaux.

Au nouveau village, on peut voir quelques vestiges de l'ancien. Il s'agit de la fontaine située sur la place du Syndicat d'Initiative à côté de la mairie, ainsi que de deux lavoirs, l'un derrière l'école et l'autre après la Poste - Place Parriaou, et de nombreux encadrements.

Plutôt que baptiser les rues et les places de noms de batailles ou d'hommes illustres on a préféré choisir les noms des lieux-dits portés sur le cadastre du village englouti : Place "Ste-Anne", Rue "Pierre Blanche", par exemple. Par la pensée, on ira toujours dans les "Iscles" ou au "Pont de Garuby".

Au village, les jeunes agriculteurs sont partis, toutes les bonnes terres sont noyées. On avait prévu deux classes, mais une seule fonctionne avec un effectif très réduit. La municipalité Signoret devra même batailler pour éviter la fermeture de l'école.

La superficie de la commune est très réduite : 450 ha seulement. On a essayé en vain de faire un réseau de canalisations pour l'arrosage ; il n'y a que deux agriculteurs dans la commune.

La transition entre une activité agricole et une activité uniquement touristique est très difficile. De plus, la période du barrage a laissé des traces. Le nouveau village n'a pas d'âme, les Sallois sont divisés, aigris, mal dans leurs maisons trop neuves, ils sont traumatisés et il faudra du temps pour faire disparaître ce mal.

En mars 1977, le nouveau maire Rossely ne fait plus l'unanimité, il est battu par son 1er adjoint, M. Signoret.

Les structures d'accueil des touristes sont insuffisantes, il faut lutter contre le camping sauvage et la pollution. Un camping municipal et deux campings privés voient le jour. A l'époque, il était question d'installer un autre camping à Trey mais il n'est pas encore réalisé : c'est "l'affaire Gallecier".

Petit à petit la vie s'organise mais il y a trop de différence entre la période hivernale trop longue et la période estivale trop courte. L'hiver, le village est triste et mort avec sa centaine d'habitants permanents. L'été, il en compte 30 FOIS PLUS, avec les problèmes occasionnés par ce décalage. Les commerçants se plaignent, maintenir un commerce est difficile, ils ne travaillent que pendant deux mois. Il y a bien une "superette" mais elle ne reste ouverte que pendant l'été, elle ferme avec le départ des touristes.

Dans les années 1980, personne ne se décidant à ouvrir une boulangerie, la municipalité, estimant que c'était indispensable et vital pour le pays, décide d'en construire une et d'y placer un gérant libre. Aujourd'hui, avec la boulangerie, la boucherie et une petite épicerie sont les seuls commerces d'alimentation qui restent ouverts toute l'année. A l'origine du nouveau village, il y avait un bureau du Crédit Agricole, il est fermé. Heureusement qu'il nous reste le bureau des postes. Pendant l'été, un grand marché fonctionne sur la place tous les jeudis matin.

Pour animer le pays on achète 3 courts de tennis à un particulier et on construit des locaux pour recevoir des activités nautiques de l'UCPA. C'est aujourd'hui remplacé par un Centre de Vacances. On a l'intention de créer un Club Nautique mais celui-ci ne voit jamais le jour.

Après avoir terminé la première tranche du lotissement, on attaque la seconde mais elle n'apporte pas un surplus d'activités au pays, la plus grande partie des lots a été acquise par des résidents secondaires et parmi eux des étrangers. La vente des dernières parcelles est difficile, leur prix étant trop élevé. On a réduit leur surface de manière que leur vente soit plus accessible et que des résidents permanents viennent s'installer au pays.

En été, avec l'arrivée massive des touristes, c'est l'insécurité qui grandit, aussi la municipalité décide de construire une gendarmerie qui fonctionne pendant 3 mois d'été. La peur du gendarme a été efficace. En même temps, pour éviter que les campings-cars s'installent n'importe où, la municipalité décide d'ouvrir un relais de campings-cars à l'entrée du pays, certains soirs on en compte plus de 100. Les riverains ne sont pas contents, ce n'est pas beau, mais provisoire. Un jour, ce terrain constructible trouvera, il faut l'espérer, une utilité plus rentable.

Pour la sécurité, on achète un camion-citerne en vue de lutter contre les incendies. Animé par M. Pey Robert, un groupe de pompiers bénévoles voit le jour sous la bannière des "Comités Communaux Feux de Forêts".

La culture n'est pas oubliée puisque tous les samedis fonctionne une bibliothèque qui compte une trentaine de lecteurs. Chacun peut y trouver le livre de son choix et discuter en buvant un thé ou un café. En plus des nouveaux livres achetés grâce à une subvention de la Mairie et ceux offerts par des donateurs, tous les 3 mois, s'ajoute une centaine de livres prêtés par la Bibliothèque Centrale de Prêt de Draguignan.

La station d'épuration a été prévue pour 800 habitants. En temps normal, il n'y a pas de problème. Mais en période estivale, c'est très insuffisant, aussi a-t-on décidé de l'agrandir. On a ajouté un bac de dégraissage plus un bassin d'oxygénation et pour envoyer au lac de l'eau non polluée, on la fait circuler dans 3 bassins de lagunage. On a également augmenté la surface des aires à boues.

Pendant l'été, un Syndicat d'Initiative est à la disposition des visiteurs. En collaboration avec EDF, un musée a été crée pour exposer des photographies et des objets évoquant la vie du village ainsi que son histoire. Des maquettes et des croquis font vivre le fonctionnement du barrage. Si ce dernier est reconnu d'utilité publique, les vieux Sallois y pensent toujours avec un peu de rancoeur. C'est M. Bidault qui a le plus oeuvré pour la création du Syndicat d'Initiative et pour le musée "LA MAISON DU LAC".

En mars 1989, M. Signoret, malade, décide de ne plus se présenter. Avec plusieurs Sallois, il contacte M. Courtine, résident secondaire et Directeur du CREPS à Boulouris. Ils lui demandent de se présenter comme maire. Ce dernier est élu à une forte majorité. Dès son installation, il modernise la mairie avec l'ordinateur et le fax. Pour animer le pays, étant donnée la vogue du golf, on fait installer un practice de golf. A côté, pour occuper les enfants, on met en place des halfs-courts. Derrière la gendarmerie, un Grand Espace Sportif voit le jour avec terrains de volley, de basket et de hand. C'est le maire qui a l'idée de créer une Association Sportive, Culturelle et de Loisirs. Il charge un de ses conseillers, M. Simian, de la mettre en place. Il se dépense pour organiser un triathlon qui a grand succès. Régulièrement, un petit journal rend compte des activités de la mairie. Pour essayer de faire vivre le pays en hiver et créer des emplois, le maire décide de construire une Résidence de Tourisme à l'entrée du pays. Il sera mis en minorité par son conseil sur ce projet et démissionnera.

En octobre 1991, après des élections complémentaires, M. Amoulric le remplacera.

En 1993, pour resserrer les liens entre les Sallois, un Club est crée. Il groupe plus de 40 membres. On se réunit 2 jours par semaine pour discuter, travailler, jouer, prendre des repas en commun, faire des sorties. Il complète l'Association qui s'occupe plus particulièrement du Comité des Fêtes et des Animations sportives et culturelles. Un second triathlon a été organisé ainsi qu'un super marathon qui a eu un grand succès. En collaboration avec les localités situées au bord du lac, de grandes fêtes étaient prévues pour les 20 ans du nouveau village, mais faute de crédits, ces dernières n'ont pas pu avoir lieu. L'aménagement de la Place Ste-Anne est terminé, elle est belle et accueillante.

On trouve aux Salles un cadre merveilleux qui attire des touristes de toute l'Europe. Entre mer et montagne, sa situation est privilégiée. Aussi le village vit intensément pendant l'été. Il est mort en hiver. Notre espoir est de le faire vivre pendant le reste de l'année, ce sera difficile mais il faut persévérer. Pour cela il faut attirer dans la commune un plus grand nombre de résidents permanents et créer des activités. Faire venir des artisans dont le métier est de produire l'hiver des objets qui seront vendus en été. Dans ce but, des "Ateliers relais" sont à l'étude. Pour héberger ce complément de population, des HLM gérés par l'Office Départemental seront construits.

Les années ont passé et les rancunes effacées. Le temps a rapproché ceux qui étaient heureux de monter au nouveau chef-lieu et ceux qui regrettaient le village dans la vallée.

Les Sallois qui sont montés au nouveau village pour vivre ensemble, pour lui donner une âme, ont fait en quelque sorte un pari. Celui-ci sera gagné car le village est comme un chêne puissant qui, à la suite d'une tempête, aurait perdu une partie de ses branches. Ayant toujours ses racines, il vivra, de nouvelles branches grandiront et le chêne retrouvera sa splendeur passée.

Le village, à la suite du barrage, a perdu plusieurs de ses éléments qui constituaient les forces vives de la Communauté. N'ayant pas perdu ses traditions de persévérance, de ténacité, d'attachement au pays, nul doute que grâce à son implantation, grâce à la beauté du site, grâce au lac, grâce à un complément de population, le village retrouvera une vie active où cohabiteront jeunes et retraités dans un développement harmonieux d'animation communale.




(1) Il semblerait que "Salets" soit une erreur de transcription, car la commune a porté autrefois le nom de "Saleta", alors que ce nom n'est pas listé ici. Pour avoir plus d'informations sur les noms portés par la commune, et leur étymologie possible, vous pouvez consulter la page des origines de l'ancien village, qui complète les informations données par François Simian (retour au texte de la monographie).

(2) Dans le texte original de "Monographie des Salles-sur-Verdon", François Simian avait écrit par erreur "Bagarre", puis "Bagarri", et non "Bagarry". Le dernier représentant de cette famille, que François Simian a bien connu, était en effet appelé par tous les Sallois "Léon Bagarre", alors que son nom réel était en fait "Léon Bagarry". Le dernier représentant de cette riche famille est le héros malheureux de "Love Story aux Salles" que vous pouvez lire par ailleurs (retour au texte de la monographie).








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